Transatlantica 3/ 2003
Armand MATTELARD et Erik NEVEU. Introduction aux Cultural Studies. Paris : La Découverte, 2003, 122p. 7.95 E. Lu par Michel Imbert (Université de Paris VII-Denis Diderot). Le premier chapitre évoque les travaux des pères fondateurs : le retentissement profond de louvrage de Richard Hoggart, The Uses of Literacy (1957), linfluence non moins marquante de Culture and Society de Raymond Williams (1958), qui décrivait le rôle salvateur assigné à la culture par un Matthew Arnold ou un F.R Leavis, enfin, létude dEdward P.Thomson, The Making of the English Working Class (1963), qui fit date dans lhistoire sociale. Lengagement de ces chercheurs dans la Nouvelle Gauche est souligné ainsi que leur position relativement marginale dans le monde universitaire. Le second chapitre décrit la floraison des Cultural Studies à partir de 1964, la façon dont lintérêt pour la vie quotidienne de la classe ouvrière a fait progressivement tache dhuile en sétendant aux sous-cultures jeunes, puis à la question du « genre » masculin/ féminin et à celle du racisme. La culture ny est jamais appréhendée indépendamment des enjeux de pouvoir mais comme un processus de résistance à des stratégies dhégémonie. Cette approche interdisciplinaire se situe à la croisée des influences théoriques les plus diverses (le marxisme dAlthusser, la sémiologie de Barthes, la sociologie de lécole de Chicago, entre autres), comme en témoigne la réflexion novatrice de Stuart Hall. Dans les années 80, marquées en Grande-Bretagne par le tournant conservateur, lintérêt sest déplacé vers la réception des médias par divers publics et la construction dune identité individuelle recomposée à partir de ses appartenances multiples (classe, race, genre, nation ...). Le quatrième chapitre retrace linternationalisation des Cultural Studies déjà fortement implantées en Grande-Bretagne dans les polytechnics et lOpen University, leur influence croissante dans les départements duniversité aux Etats-Unis et en Amérique latine, linflation de revues sy rattachant dans les années 90. Cette expansion mondiale sest accompagnée dune fragmentation de la recherche et dun certain désengagement politique. Pour conclure, les auteurs soulignent la prédilection actuelle de ces études pour les objets-fétiches de lindustrie culturelle (comme la poupée Barbie ou Madonna) et sinterrogent sur les conditions dun renouveau du « matérialisme culturel », notamment dans le domaine des études postcoloniales. Le mérite de cette « introduction » est de baliser un champ foisonnant et desquisser en termes clairs lévolution historique dune « anti-discipline » parfois confuse. Les nombreuses références au fil du texte et la bibliographie sélective en fin douvrage témoignent dun remarquable souci de synthèse. |
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