Transatlantica 4/ 2004

 

Hilary KAISER. Des Amours de GI’s. Les petites fiancées du débarquement. Paris, Taillandier, 2004, 280 p. 23 Euros. Lu par Jacques PORTES (Université Paris-8)

Hilary Kaiser s’est passionnée pour les «war brides», ces filles – dans cet ouvrage, les Françaises – ont épousé des soldats américains à la fin des deux guerres mondiales, elles ont été reconnues par les autorités militaires et leur transport transatlantique a été assuré par celles-ci. Dans le premier chapitre, elle fournit les renseignements généraux sur ces «war brides», dans le contexte de la présence américaine en France; pour chacune des deux guerres, environ 6000 de ces jeunes femmes sont parties aux États-Unis pour rejoindre leurs maris souvent revenus avant elles. L’auteur ne s’explique pas la similitude de ces chiffres, alors que les deux conflits n’ont pas déplacé le même nombre de soldats et n’ont pas eu la même durée. Les chapitres suivants regroupent les résultats d’une enquête orale menée dans les années récentes par Hilary Kaiser auprès de certaines de ces femmes : elle n’a retenu que vingt-cinq cas pour 1945 et trois pour 1918; la moitié de celles-ci a divorcé. Ces femmes racontent leur expérience de façon spontanée et toujours intéressante, d’autant qu’elles venaient de milieux différents et ont été réparties dans diverses régions des États-Unis. Chacune a eu des débuts difficiles, se retrouvant dans une ville ou une bourgade inconnues, sans connaître l’anglais pour la plupart et ayant comme seul appui un homme presque inconnu et repris par son milieu. Passé le temps du choc, les cas sont très différents, depuis celui de Marcelle isolée dans une ferme de l’Alabama où elle découvre le racisme, jusqu’à Denise à Long Beach où le beau temps et la plage ne masquent pas l’instabilité de l’époux; très souvent, la promiscuité avec la belle-famille est pesante et suscite des crises. Aussi, n’est-il pas rare que ces femmes rêvent de la France et, quand c’est possible, elles y rentrent au moins pour quelque temps. Passée l’inévitable période d’adaptation, certaines jeunes femmes trouvent une relative stabilité, avec des enfants, le travail ménager, parfois un travail, d’autres réalisent qu’elles se sont trompées et ne s’entendent pas bien avec leur mari, dont un pourcentage non négligeable est touché par l’alcoolisme. Certaines rentrent définitivement en France, d’autres font leur vie aux États-Unis, en se remariant, la plupart de celles-là gardent contact par le travail et les connaissances avec leur terre natale, même quand elles ne regrettent rien.

L’historien regrette qu’Hilary Kaiser n’ait pas mené une étude plus complète de ces «war brides», en dressant une véritable typologie de ces immigrantes particulières, mais le simple lecteur a pris un grand plaisir à ces histoires de vie, aux confins des grands mouvements de l’histoire.

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